La GRC se dit convaincue que des diplomates indiens ont pris part à des homicides et des actes violents au pays

La GRC s’est dit convaincue lundi que des diplomates indiens ont pris part à des homicides et des actes violents au pays, ce qui a conduit le Canada à expulser six représentants du gouvernement indien dont le haut-commissaire.

Selon la GRC, des membres de la communauté de l’Asie du Sud auraient été menacés afin de travailler pour l’Inde, ce qui a amené le Canada à agir. Le corps policier invite même les témoins à communiquer avec lui.

En fin de journée, le premier ministre Justin Trudeau a affirmé avoir expulsé les diplomates «pour protéger les Canadiens.»

«C’est quand même extraordinaire la révocation d’un ambassadeur. Mais il ne faut pas se surprendre, il semblerait ne pas y avoir beaucoup de coopération du côté indien», analyse Serge Granger, directeur de l'École de politique appliquée de l’université de Sherbrooke et spécialiste de la géopolitique en Asie

«La GRC doit avoir des éléments convaincants lui permettant de croire à l’implication du gouvernement indien dans l’assassinat de Hardeep Singh Nijjar», ajoute M. Granger au sujet de ce citoyen canadien d’origine sikh tué à Vancouver en 2023.

La religion

L’hindouisme est la religion de 80% des Indiens. Le gouvernement du président Modi met de l’avant des positions ultranationalistes pour favoriser ce groupe au détriment des autres. Par comparaison, les sikhs forment moins de 2% de la population indienne et réclament l’indépendance d’une partie du pays.

«Il y a environ 1,5 million d’Indiens au Canada dont la moitié sont Sikhs. À cela on peut ajouter des Népalais, des Bengalis et des Pakistanais, ce qui donne environ 2 millions de personnes en tout. Ce qu’on comprend c’est qu’il y a eu des tentatives d’intimidation. Des mouvements proches du gouvernement Modi s’assurent qu’il n’y ait pas (au Canada) d’éléments minant l’unité indienne. Il y a de la pression sur les communautés indiennes non hindoues de célébrer l’unité indienne au détriment du pays sikhs», avance M. Granger.

«Le Canada a la plus grande diaspora sikhe du monde. Beaucoup depuis Vancouver militent pour leur autonomie. Notre police secrète est née il y a un siècle pour espionner les sikhs pour le compte des Britanniques», explique le professeur.

Commerce

La balance commerciale est nettement en faveur du Canada qui exporte principalement de services en Inde.

«Nos échanges avec l’Inde sont déjà très modestes par rapport à ce qu’ils pourraient être. Notre relation en dents de scie fait en sorte qu’il n’y a pas eu l’envol auquel on pourrait s’attendre. Cela va ralentir la croissance potentielle de nos échanges économiques. Avec la politique Indo-Pacifique lancée par le Canada pour relancer une relation décevante, on voit aujourd’hui une autre raison pour que ça ne fonctionne pas. Les 11 autres pays qui ont des politiques Indo-Pacifique n’ont pas cette réalité avec la diaspora sikhe», conclut Serge Granger.

• Importations de l’inde en 2023 : 8,9 G$
• Exportations en Inde en 2023 : 15,4 G$

-Source : Statistiques Canada, échanges de biens et de services

• En 1974 l’Inde fait exploser une bombe atomique grâce à des éléments provenant de ses deux réacteurs nucléaires canadiens Candu. «Le Canada s’est senti trahi parce qu’il insistait pour que l’utilisation des réacteurs soit à des fins pacifiques. Cela a conduit au gèle de nos relations pendant une dizaine d’années», a expliqué Serge Granger.
• En 1985 le vol 1982 d’Air India Montréal-Londres-Bombay explose au-dessus de l’Irlande tuant 329 personnes. Des extrémistes sikhs sont accusés. «Quand les Indiens disent qu’ils se sentent menacés au Canada, ils peuvent toujours sortir cette preuve. C’est un fantôme qui demeure dans le sentiment de sécurité de la diaspora indienne (hindouiste) au Canada», avance M. Granger.