Le sort du géant nippon des dépanneurs Seven & i, propriétaire des magasins 7-Eleven et convoité par son rival québécois Couche-Tard, est un enjeu de «sécurité économique», a estimé jeudi un ministre japonais, pointant le rôle crucial du distributeur lors de catastrophes dans le pays.
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Seven & i, qui possède 85 000 magasins dans une vingtaine de pays, avait rejeté en septembre une proposition de rachat par Alimentation Couche-Tard (ACT), jugée sous-évaluée.
Le groupe canadien a depuis amélioré son offre, qui valoriserait l'entreprise nipponne à environ 45 milliards de dollars, mais Seven & i a assuré étudier une proposition alternative émanant de la famille de son fondateur pour racheter toutes les actions du groupe et le sortir de la Bourse.
«La sécurité économique est un nouveau domaine (qu'il faut prendre en compte). Par exemple, l'acquisition de Seven-7, je pense, y est étroitement liée», a déclaré devant la presse jeudi le ministre japonais pour la Revitalisation économique, Ryosei Akazawa.
«Du point de vue de la prévention des catastrophes (...) nous devons obtenir la coopération des exploitants de dépanneurs pour envoyer des aliments chauds» aux travailleurs bénévoles comme aux résidents dépourvus de logements et d'accès à la nourriture dans les régions frappées par un désastre, a-t-il observé.
Un quart des magasins 7-Eleven se trouvent au Japon, où ces dépanneurs omniprésents vendent aussi bien des plats à emporter que des billets de concert et proposent des services de proximité (distributeurs bancaires, paiement de factures...)
Surtout, en raison de son réseau serré de magasins et de supports logistiques à travers tout le territoire, les 7-Eleven jouent traditionnellement un rôle clé lors des situations d'urgence, en particulier les catastrophes naturelles - séismes, glissements de terrain, typhons - qui frappent régulièrement l'archipel.
C'est une «question importante» examinée par l'agence gouvernementale de gestion des catastrophes: «si, par exemple, Seven-7 devient une société à capitaux entièrement étrangers avec la recherche de la rentabilité comme première priorité, offrira-t-elle vraiment une coopération totale en cas de catastrophe?» s'est interrogé M. Akazawa.
Signe du caractère symbolique des dépanneurs dans le pays, Tokyo a ainsi classé mi-septembre Seven & i comme entreprise «essentielle», ce qui complique les procédures d'un éventuel rachat par une entité étrangère.
Les commentaires de Ryosei Akazawa interviennent après le blocage par le président américain Joe Biden du géant sidérurgique américain U.S. Steel par son rival japonais Nippon Steel au nom de risques pour la «sécurité nationale» des États-Unis.
Une décision qui a provoqué la consternation et l'incompréhension au Japon, proche allié de Washington.
Seven & i a par ailleurs fait état jeudi de résultats en berne au troisième trimestre de son exercice décalé 2024-2025.
Il a vu son bénéfice net s'effondrer de 89 % sur un an, plus qu'attendu, à 11,4 milliards de yens (70 millions d'euros) sur la période de trois mois, achevée fin novembre.
Dans le même temps, son chiffre d'affaires stagnait à environ 3000 milliards de yens, pénalisé par une inflation plombant la consommation au Japon et par une faiblesse des ventes aux États-Unis, son marché phare. Son bénéfice d'exploitation a, lui, plongé de 24 %.
Ces difficultés persistantes, témoignant que Seven & i a du mal à enrayer le déclin des ventes de détail, pourraient encourager certains des investisseurs du groupe à intensifier leur pression en faveur d'une vente à Couche-Tard.