Activités terroristes en forte croissance au pays: 25 personnes accusées

OTTAWA | Les forces de l’ordre ont multiplié les accusations pour des activités terroristes dans la dernière année, déposant près de cinq fois plus d’accusations qu’un an plus tôt, sur fond de tensions grandissantes au Moyen-Orient.

La Gendarmerie royale du Canada (GRC) a déposé 83 accusations pour extrémisme violent contre 25 personnes, entre le 1^er avril 2023 et le 31 mars 2024, a révélé à la Chambre des communes le sous-commissaire Bryan Larkin, des Services de police spécialisés de la GRC.

M. Larkin a indiqué que le phénomène est directement lié au «contexte international» et s’est inquiété du nombre de mineurs impliqués: 7 des 25 accusés ont moins de 18 ans. Deux ont été arrêtés à Ottawa en décembre, soupçonnés de planifier un attentat antisémite à l’aide d’une substance explosive.

Pour Christian Leuprecht, professeur à l’Université Queen’s et au Collège militaire royal du Canada et expert en sécurité nationale, ces chiffres ont de quoi inquiéter, car à ce rythme, «il y a un risque élevé que quelqu’un échappe aux services de renseignement».

Crainte d’attaque antisémite

Si l’attaque d’Ottawa a été évitée, le Centre intégré d’évaluation du terrorisme (CIET) en craint d’autres.

«Une attaque menée par un acteur solitaire – inspiré par l’idéologie ou l’extrémisme religieux tel que le néonazisme ou Daech (ISIS) – visant des intérêts juifs au Canada est une possibilité réaliste», notait-il dans un mémo obtenu par Global News et daté du 10 juillet.

Peu après, la GRC a arrêté en banlieue de Toronto deux hommes soupçonnés de liens avec Daech présumément «à un stade avancé» de planification d’une «attaque grave et violente». Un autre homme, soupçonné de planifier un attentat contre une synagogue de New York, au nom de Daech, a été arrêté près de Montréal en septembre.

En parallèle, jamais la police n’a déclaré autant de crimes haineux (+32% en 2023), et la communauté juive est la première visée (+172% depuis 2020), indique Statistique Canada.

La haine en toute liberté

«De nombreux Canadiens juifs et israéliens ne se sentent plus en sécurité sur leur lieu de travail, à l’école et dans les lieux publics», indique le Centre consultatif des relations juives et israéliennes (CIJA), qui appelle à en faire plus pour stopper la haine.

Pour Matthew Levitt, ancien du contre-terrorisme au FBI et chercheur à l’Institut de Washington pour la politique au Proche-Orient, le Canada n’en fait pas assez, en particulier contre les discours haineux, laissant libre cours à des manifestations qui font notamment l’apologie du massacre du 7 octobre en Israël.

Le Directeur des poursuites criminelles et pénales a par exemple déterminé que la preuve ne permettait pas de porter d'accusation pour incitation publique à la haine contre le Montréalais Adil Charkaoui après qu'il eut déclaré: «Dieu, charge-toi des sionistes agresseurs. Ô Dieu, assure-toi de n'en laisser aucun» devant une foule à Montréal en octobre 2023.

«Quand on permet aux gens de protester non pas contre la mort d’innocents dans une guerre, mais contre un groupe religieux ou ethnique, le danger est de glisser vers la violence», s’inquiète M. Levitt.

Mounia Ait Kabboura, experte en radicalisme islamique au Centre d’études du religieux contemporain de l’Université de Sherbrooke, explique que les islamistes utilisent la cause palestinienne pour recruter de jeunes révoltés et distiller les thèses sectaires, révolutionnaires et anti-impérialistes du jihadisme.

Or, «plus la marque islamiste grandit, plus on va avoir des problèmes», prévient-elle.

Crimes haineux déclarés par la police

2020 

• Nombre 2646 – Variation par rapport à l’année précédente +36%
• Contre la religion juive 331 (+8%)
• Contre la religion musulmane 84 (-54%)

2023 

• Nombre 4777 – Variation par rapport à l’année précédente +32%
• Contre la religion juive 900 (+71%)
• Contre la religion musulmane 211 (+94%)

Source: Statistique Canada