Les sondages prédisent que le chef du Parti conservateur Pierre Poilievre pourrait devenir le prochain premier ministre du Canada. Pourtant, une aura de mystère plane encore sur lui, même s’il siège à la Chambre des communes depuis 20 ans. Le Journal s’est rendu dans la province qui l’a vu grandir, l’Alberta, dans sa circonscription rurale d’Ottawa, et parlé à de nombreux ex-collaborateurs pour tenter de percer l’énigme Poilievre.
Le style populiste de Pierre Poilievre, marqué par des slogans et des attaques personnelles, fait rager ses adversaires politiques qui ont l’impression que l’Albertain joue un jeu.
«Il ne prend pas au sérieux la politique, pour lui, c’est un jeu», lance le député libéral franco-albertain Randy Boissonnault.
Le néo-démocrate Alexandre Boulerice y voit lui aussi une forme de théâtre.
«J’ai eu à l’affronter en Chambre [des communes] quand il était ministre conservateur, sur les droits des travailleurs, la retraite repoussée à 67 ans ou des coupes pour les vétérans. Il est extrêmement féroce, incisif et a tendance à faire des raccourcis. Puis après, tu le croises dans le couloir et il est relax et sympathique, comme si tout avait été un jeu [...] il veut juste gagner et prouver qu’il a raison», décrit-il.
«Mais ça a des conséquences pour vrai dans la vie des gens», déplore le député montréalais.
«[Poilievre] est très bon pour faire des attaques, des slogans, mais ça ne peut pas gouverner, s’il n’y a pas de solution.»
Déconnecté
Pour Alexandre Boulerice, Pierre Poilievre ressemble beaucoup plus aux élites qu’ils dénoncent qu’à la classe moyenne.
«Le gars n’a jamais eu d’autres jobs que sur la colline Parlementaire», dit-il, rappelant en riant les discours où Poilievre a parlé des électriciens qui captent la foudre pour allumer des ampoules ou des soudeurs qui travaillent à mains nues.
Il ajoute que son équipe est formée de lobbyistes, les mêmes qu’ils dénoncent à Ottawa.
Intentions cachées?
Autant les libéraux que les néo-démocrates brandissent l’épouvantail des intentions cachées pour mettre en doute les prises de position du chef conservateur en faveur de l’avortement et du mariage gai.
«Ces députés parlent pour lui», estime le ministre Boissonnault, qui dit avoir peur pour les jeunes personnes trans si Pierre Poilievre était porté au pouvoir.
Il souligne d’ailleurs l’absence des conservateurs aux différents événements de la Fierté et la présence de certains députés à des manifestations anti-choix, par exemple.
Pour sa part, le Bloc Québécois a décliné notre demande d’entrevue.