La possibilité que des oiseaux provoquent une catastrophe aérienne comme celle qui a coûté la vie à 177 personnes en Corée du Sud existe bel et bien au Québec, mais la situation est contrôlée, affirme un expert.
«Le risque zéro n’existe pas dans un pays comme le nôtre, couvert de forêts et d’animaux sauvages, mais il y a moyen de faire en sorte que les accidents soient le plus rares possible», dit au Journal Pierre Molina, un biologiste qui se consacre à la gestion du péril faunique autour des aéroports depuis plus de 20 ans.
Même si l’enquête sur l’accident de dimanche en Corée du Sud n’est pas complétée, les médias ont rapporté qu’il aurait été causé par une collision avec des oiseaux au moment où l’avion allait atterrir.
Risque en croissance
Le 17 mai 2020, l’impact d’un oiseau a causé l’écrasement d’un avion militaire Snowbird près de Kamloops, en Colombie-Britannique, ce qui a entraîné la mort de la capitaine Jenn Casey.
Dans l’histoire de l’aviation civile au Canada, il n’y a pas eu d’accident mortel causé par des oiseaux, mais la faune ailée a causé la frousse à de nombreux pilotes (voir encadré).
Aux États-Unis, en 2009, des oies blanches ont abîmé les réacteurs d’un Boeing de la compagnie US Airways au décollage de l’aéroport de New York.
«Le pilote avait réussi à poser l’avion dans le fleuve Hudson. Un miracle dont on a tiré un film», poursuit le coprésident de l’Association canadienne sur le péril aviaire.
Bernaches et oies blanches connaissent une explosion démographique dans l’est du pays, ce qui préoccupe les administrations aéroportuaires.
D’autres espèces de goélands (l'oiseau le plus souvent impliqué dans des accidents au Canada) et de canards peuvent aussi causer des dégâts importants, sans parler des cerfs, des caribous et des orignaux, qui s’introduisent parfois aux abords des pistes.
Cap sur la prévention
Avec 108 employés, dont plusieurs biologistes et techniciens en aménagement de la faune, Faucons Environnement est l’entreprise la plus importante dans son domaine au Canada. En plus de Montréal, ses spécialistes mènent une surveillance constante dans les aéroports civils et militaires de Toronto, Vancouver, Winnipeg et Calgary et amorcent une percée dans plusieurs États des États-Unis.
«Nous menons des actions réactives comme la fauconnerie, l’effarouchement par pyrotechnie et même l’abattage par arme à feu si nécessaire, mais le plus important demeure les actions préventives», explique l’ornithologue, qui a commencé dans le métier en 1997. Lui-même fauconnier, il lâchait les oiseaux de proie dans le ciel à proximité des pistes d’aéroport pour faire fuir les volatiles.
Le plus grand défi, actuellement, consiste à diminuer les risques autour des aéroports, où les populations d’oiseaux peuvent être favorisées par des détails comme... la hauteur du gazon.
On sait que les bernaches du Canada aiment la pelouse. Le seul fait de garder les brins très courts les décourage, car les végétaux deviennent difficiles à brouter.
2000 impacts causés par les oiseaux chaque année au Canada
Selon l’Association canadienne sur le péril aviaire, plus de 2000 impacts avec les oiseaux sont rapportés aux autorités chaque année au Canada.
S’ils sont rarement mortels, ces impacts peuvent avoir des conséquences sérieuses. Trois exemples.
– Le 24 octobre dernier, un Boeing 737 Max 8 de la compagnie Flair Airlines subit une collision avec des oiseaux non identifiés au décollage à Toronto. Le pare-brise du cockpit est endommagé et il menace la pressurisation. Les pilotes décident de faire demi-tour.
– Le 22 juin 2019, un avion de la compagnie WestJet, qui a décollé de Calgary, à destination de Toronto, a dû rebrousser chemin après avoir heurté un oiseau au moment du décollage. L’espèce n’a pas été précisée.
– Le 26 octobre 1992, un Boeing 747 de la KLM frappe une volée de bernaches du Canada peu avant l’atterrissage à Calgary. Dégâts matériels importants.
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